Situations d'Apprentissage Ouvertes
(SAO-TIC)
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Comme pédagogue en science et technologie, il nous semble important d'essayer de définir, tant bien que mal, ce qu'est la « Techno-Science » et quelles stratégies on doit mettre en oeuvre dans notre enseignement pour tenter d'optimiser les apprentissages des élèves.

Pourquoi parler de « Techno-Science » ? 

Une question : où s'arrête la technologie et où commence la science dans un laboratoire de recherche? Que ce soit dans un laboratoire technologique ou scientifique, les deux « mondes » s'entrecroisent. L'un a généralement besoin de l'autre pour atteindre ses finalités. Donc, pour nous, le terme «Techno-Science» est davantage représentatif de cette dépendance que celui de « Science et Technologie ».  Question de vision!

« La réalité de Dieu »

« La réalité de Dieu » est un piège pour les pédagogues Techno-Scientifiques, car lorsqu'on enseigne des concepts, on a souvent l'impression d'enseigner la « réalité » et non pas « une construction de l'humain pour l'humain ». Une loi scientifique ne fait que donner un sens à des observations contextualisées.  Elle n'est pas la « réalité de Dieu ».  C'est-à-dire que seul Dieu sait si la loi est « vraie ».

Pour expliquer ce concept, je me baserai sur un tableau que j'ai publié il y a quelques années.  Celui-ci compare une vision réaliste et une vision constructiviste de la science.

Simplement, dans la colonne de gauche (réalisme), le scientifique trouve des choses (théories) dans un tiroir. Ces choses sont les seules qui peuvent y prendre place.

Dans la colonne de droite (constructivisme), le scientifique construit le tiroir (comme par exemple la gravité) et son contenu (les lois de la gravitation), car le concept de la gravitation n'existe pas en soit.  On l'a inventé pour expliquer des phénomènes. Dans ce paradigme, le scientifique sait aussi que d'autre chose pourrait mieux s'adapter au tiroir (qui est lui-même modifiable).

Si nous adoptons le réalisme comme vision, nous promouvons ainsi un dogme au même titre que la religion, tant dénigrée par beaucoup de scientifiques. Un dogme, car la « réalité de Dieu » est aussi indémontrable que l'existence même de Dieu.

Par contre, le constructivisme exprime que l'humain a une responsabilité sur ses « recherches » et ne peut plus se détacher des effets qu'elles pourraient avoir dans la société. Car le scientifique « construit » dans un but, il ne trouve pas objectivement!

Les élèves, de futurs décideurs!

Est-ce que, comme citoyen (décideurs dans une démocratie), nous avons notre mot à dire dans les décisions « scientifiques »? Par exemple, est-ce qu'on accepte comme société d'autoriser la production d'OGM? Ou encore, est-ce qu'on doit laisser faire les recherches sur le clonage humain?

Nous croyons que nous devons intervenir, car nous sommes les « cobayes »! Qui subira les effets secondaires des OGM sur l'environnement ? Il ne faut pas se cacher la tête dans le sable, un champ de blé modifié génétiquement a des effets sur l'écosystème environnant. Qui peut nous dire quels sont les effets (positifs ou négatifs)? Le but étant de faire plus de profits, il sera difficile après coups de revenir en arrière.

Nous devons le faire aussi pour que les scientifiques ne se sentent pas trop « forts ». Car si personne ne met des limites, il y aura des recherches qui auront des conséquences très graves pour la population. Qui sait ce que deviendra une société qui manipulera génétiquement ses enfants pour en faire ce que les parents désirent? « Le meilleur des mondes » d'Aldous Huxley est un roman des années 1930 qui, d'une façon non « scientifique », nous présente une telle société. Voir cette page ou encore celle-ci.

Selon moi, il est important de tenter d'éveiller les jeunes à ce genre de questionnement et de les outiller à affronter les « scientifiques » face à de tels sujets. Non pas seulement en faisant des marches, mais aussi en confrontant les décideurs politiques et les « experts » de façon structurée et efficace.

L'école veut former des citoyens qui s'impliqueront dans l'avenir de leur société. Ne devrait-on pas alors les initier le plus tôt possible à cette responsabilité? Car après tout, ne disons-nous pas que la jeunesse est notre futur?

Connaissances ou compétences?

Ceci dit, que doit-on faire apprendre à nos jeunes? Des connaissances (l'oxygène possède 8 protons) ou des compétences (esprit critique)?

Le nouveau programme de formation de l'école québécoise nous dit que ce sont des compétences. Ce qui est très bien pour préparer nos jeunes à vivre dans le monde actuel et futur.  Mais n'oublions pas que quelqu'un de compétent a des connaissances également!

La question à 100 $ est de savoir comment devons-nous procéder pour développer ces compétences? Nous expérimentons une approche dans le cours de sciences physiques 4e secondaire depuis 3 ans. Ce cours s'intitule : Cours de sciences par SAO (Situations d'Apprentissage Ouvertes).

Dans une telle approche, les élèves ont de « l'espace » pour accomplir la tâche demandée par l'enseignant. Contrairement à lorsque l'enseignant faisait ses préparations de classes très minutées.

Une autre question : Quel type de situation peut mettre le plus d'élèves en actions et les préparer à « affronter les experts »? Je crois que favoriser des situations « réelles » où les élèves auraient à remettre des recommandations à leur direction d'école ou leur maire (pourquoi pas le premier ministre ?) est une piste intéressante.

Imaginons une SAO où les élèves ont réussi à comprendre la plupart des concepts entourant le traitement des eaux, les ont structurés sur un média quelconque (pourquoi pas un site web ?), et les ont communiqués à leur conseil de ville en leur recommandant d'apporter certaines modifications afin d'éviter des problèmes de santé dans la population !

Ou encore, en prenant des échantillons d'eau d'une rivière à divers endroits.  Les élèves découvrent une source de pollution que les autorités ne connaissaient pas ! Voir la SAO « Du Lac Mégantic au Fleuve Saint-Laurent en passant par la Chaudière !

Il n'est pas nécessaire de toujours réaliser des SAO d'une aussi grande envergure.  L'esprit d'une implication dans la société (classe, école, village...) est importante. Gérer écologiquement un petit parc voisin de la cour d'école peut être très riche en apprentissage.

Qu'auront-ils appris ?

Des connaissances seront acquises? C'est certain. D'une part, il y a très peu d'élèves qui iront à l'Hôtel de Ville sans connaissances pour répondre aux questions des adultes. D'autre part, en « faisant » un jardin par exemple, s'il y a des plantes qui poussent jusqu'à maturité, il y a eu apprentissage de connaissances. Dans tous les cas, on retrouve des connaissances contextualisées et exploitées.

Des compétences seront-elles également développées? Croyez-vous possible de produire ce genre de rapport et de ne pas développer de compétence? Moi non. Il y a eu nécessairement de la coopération, utilisation d'une méthode de travail (qui deviendra efficace), exploitation de l'information, résolution de problèmes, communication, etc.  L'enseignant doit cependant cibler celles qu'il veut observer pour par la suite pouvoir accompagner les élèves vers la réussite.

Pour ce qui concerne la vision de la Techno-Science, ils auront appris que même s'ils ne sont pas des « scientifiques », ils peuvent faire une différence. De plus, ils savent qu'après avoir réalisé ces SAO, que la Techno-science se fait dans et pour une société. Donc, que la vision du « réalisme » n'est pas « réaliste ».

Et les enseignants eux ?

C'est bien beau ces jolis mots, mais comment mettre cela en pratique dans une classe ?  Malheureusement, aucune recette ou aucun matériel clé en main existe ou même existera ! Nous aussi, nous avons à nous mettre en démarche d'apprentissage.

« Oui mais je n'ai pas d'idée pour partir et il me manque des connaissances scientifiques pour passer à l'action! » Nous répondons à la deuxième partie de la question en disant que, comme enseignant, nous n'avons pas à posséder toutes les connaissances entourant un sujet pour laisser ses élèves l'explorer. De plus, il existe un professeur extraordinaire du nom de Google ! N'hézsitez pas à lui une question.  Il vous donnera sûrement de bonnes pistes de réponses.

Pour ce qui est des idées, là c'est un réel problème, car si la SAO est trop élaborée, il n'y a plus de place pour la créativité de la classe. Et si on ne donne que la problématique, le travail peut sembler trop lourd pour l'enseignant qui veut se lancer. Alors que faire ? Une piste de solution exploite les « réseaux de concepts ». 


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