Projet Design : Ville du futur

Faire autrement en mathématique au secondaire

Publié le mercredi 20 novembre 2019

École Louis-Riel, CS de Montréal

Allier les mathématiques, la créativité, la résolution de problèmes, la collaboration, les enjeux sociaux et les outils numériques, c’est le défi que Anne Labbé a réussi à relever. Elle a fait vivre à ses élèves une tâche d’envergure, le Projet Design : Ville du futur. Anne, ainsi que deux de ses élèves de l’an dernier, Yanis et Angelina, ont accepté de nous décrire les grandes lignes de ce projet.

Photo de Anne, Angelina et Yanis

Qui est Anne Labbé ?

Anne est enseignante de mathématique en 2e secondaire à l’école Louis-Riel, de la commission scolaire de Montréal. Dans ses pratiques pédagogiques, elle préconise beaucoup les projets concrets, l’utilisation de matériel et les manipulations pour travailler autrement le développement de la pensée. Elle se sert aussi d’outils numériques, elle fait de la robotique et de la programmation. Avec ces différentes pratiques, elle cherche à capter l’intérêt de ses élèves et à les placer dans des projets signifiants et complexes où ils peuvent faire des transferts de connaissances.

Qu’est-ce que le Projet Design : Ville du futur ?

C’est un projet qui s’adresse aux élèves inscrits au PEI (programme d’éducation intermédiaire). Le PEI est composé de huit champs de connaissance reliés par des contextes mondiaux qui fournissent un cadre adapté à l’apprentissage disciplinaire et interdisciplinaire. L’un de ces huit champs est le design, d’où la place de ce projet au PEI.

En équipe, les élèves devaient concevoir une maquette en 3 dimensions, à échelle réduite, qui représente une ville du futur dans 50 ans. La maquette devait mettre en valeur au moins un enjeu majeur des villes de demain, comme les changements climatiques, le transport, la gestion des déchets, l’habitation, le recueillement des eaux usées, l’environnement, etc.

Comme l’école Louis-Riel se situe dans un milieu urbain où les contraintes de transport et la crise du logement se font sentir, Anne a voulu sensibiliser ses élèves à ces enjeux, les amener à réfléchir collectivement à des solutions innovantes, en les plaçant dans le rôle d’architecte-urbaniste. L’idée de ce projet lui est venue suite à un voyage à Boston, une ville inondée de contraintes urbaines, mais une ville résiliente en quête de solutions.

En mathématique, les contenus travaillés dans ce projet sont l’échelle du plan, les proportions, la géométrie, le développement des solides et beaucoup de mesures.

Comme outils technologiques, les élèves ont utilisé Tinkercad, un logiciel de modélisation 3D, pour la création de certains bâtiments. Puis, leurs créations numériques ont pu prendre forme grâce à l’impression 3D. Tout au long du projet, ils ont utilisé des outils de traitement de texte sur tablette ou portable afin de créer leur dossier de conception et de recueillir les informations dans des tableaux.

Lien vers l’autoformation Tinkercad du Campus Récit

Quelles sont les grandes étapes du projet ?

Avant le projet, les élèves assistent à une conférence donnée par Guillaume Duteaud, étudiant finissant en architecture de l’Université de Montréal. Depuis trois ans, Guillaume vient en classe présenter sa conférence Concevoir et réaliser les villes de demain, dans laquelle il explique le concept d’échelle d’un plan, la conception et la réalisation d’une maquette et le futur des villes. Les élèves apprécient cette conférence.

Ensuite, le projet débute. Lors de la première étape, les élèves partent d’une problématique de la ville. Ils se questionnent sur cette problématique, ils font des recherches afin de trouver des solutions innovantes. Ils doivent citer leurs sources et décrire les solutions possibles.

La deuxième étape est le moment de réfléchir et de développer les idées relatives à la conception de la maquette. Sur papier, ils conçoivent un plan, une ébauche de leurs idées. À ce moment, les élèves ont l’occasion d’apprendre à gérer leur temps, à collaborer, à socialiser, à écouter les idées des autres et à s’autogérer.

Document de travail :

Dossier conception

C’est à la troisième étape que les élèves peuvent concevoir la maquette. C’est à ce moment que la créativité bat son plein. Certains bâtiments sont imprimés en 3D, d’autres en carton. L’espace est calculé, optimisé, tout en tenant compte des contraintes. Beaucoup de détails artistiques sont ajoutés comme des lumières, des textures, de la peinture, etc.

Finalement, à la quatrième étape du projet, les élèves doivent présenter et vendre leur idée devant public. Ils présentent le résultat de leur projet à la bibliothèque de l’école, devant un jury composé des élèves de l’année précédente.

Le point de vue de 2 élèves

Angelina s’est beaucoup investie dans ce projet. Elle dit l’avoir trouvé amusant et stimulant. Elle considère avoir développé sa créativité et son autonomie. Dans ses mots, elle nous dit que ce type de projet développe beaucoup de parties du cerveau et que son espace mental était grandement absorbé par sa réalisation. Elle a aussi rencontré quelques difficultés comme la gestion de l’horaire de l’équipe et des rencontres. Somme toute, elle a grandement apprécié son expérience et aimerait revivre ce genre de projet vu son caractère engageant.

Yanis a aussi eu une expérience positive à réaliser ce projet de grande envergure. Il y voit même un potentiel projet interdisciplinaire en histoire et mathématique. Il s’imagine construire un bâtiment historique comme la cathédrale Notre-dame-de-Paris. Il a aussi vécu quelques difficultés, surtout au niveau du travail d’équipe, où les avis étaient souvent divergents. La gestion du temps a aussi été un défi. Lui et les autres membres de son équipe ont eu besoin de périodes de récupération. Malgré les difficultés, il aimerait grandement revivre ce genre de projet.

Pour les entendre :

Retour sur le projet

Anne mentionne que son projet a atteint sa maturité et que c’était la 4e année qu’il se vivait. Il va se poursuivre cette année et l’enseignante entrevoit la possibilité de faire des liens interdisciplinaires comme en science et technologie, en arts plastiques, en anglais et en histoire.

Elle considère que, dans l’ensemble, ses élèves se sont engagés pour la plupart à 100%. Pour certains, le caractère abstrait des premières étapes a été plus difficile. Mais quand ils se sont lancés dans la création, l’engagement s’est instantanément fait sentir.

Les autres difficultés rencontrées ont été au niveau de l’assemblage des solides en carton, de la fabrication réaliste et réalisable des bâtiments, de la capacité des élèves à ne pas perdre de vue le mandat initial et de la gestion de leur temps. Le respect de l’échelle du plan a aussi été un défi de taille pour plusieurs élèves. Mais ces difficultés font partie du processus de résolution de problèmes et elles amènent les élèves à user de créativité pour les surmonter.

Outre ce projet, Anne mentionne qu’elle s’inspire beaucoup d’idées partagées sur le groupe Facebook Les maths autrement pour faire vivre à ses élèves des jeux mathématiques, pour présenter des notions différemment, pour faire une synthèse de chapitre de façon non traditionnelle. Elle utilise l’application Desmos sur tablette, ainsi que les activités interactives proposées dans le matériel didactique. Cette année, elle souhaite faire une visite à l’épicerie avec ses élèves, pour utiliser la thématique de l’alimentation afin de travailler des notions liées à l’algèbre et pour initier ses élèves à la programmation. Elle souhaite aussi mettre sur pied un projet pour sensibiliser les élèves au gaspillage vestimentaire, un projet qui vise à faire des statistiques autrement, par la compilation et l’analyse de données.

En conclusion

Le Projet Design : Ville du futur vient donner un véritable sens aux apprentissages des élèves en classe de mathématique tout en mettant un accent très fort sur leurs capacités créatrices. Cette création commune contribue à la fois au sentiment d’accomplissement de chacun et au sentiment d’avoir un impact sur leur collectivité. Les multiples compétences sollicitées chez les élèves lors du déroulement de ce projet pourront bien évidemment être utiles et transférables dans d’autres contextes scolaires, personnels ou professionnels.

Merci à Anne et deux de ses élèves, Angelina et Yanis, qui ont bien voulu nous partager leur expérience en toute transparence et avec tous les défis que cela comportait.

Stéphanie Rioux - novembre 2019

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